Peintre, dessinateur et graveur français d'origine allemande. Tempérament indépendant et rebelle à l'autorité paternelle, il vint à Berlin en 1922, se lia avec Georg Grosz, dessina sur son conseil et, au cours d'un séjour de trois mois à Paris (hiver 1924 - 25), découvrit Pascin. Il dut travailler de 1926 à 1932 comme dessinateur de publicité industrielle. Son art prit forme à partir de la Poupée, mannequin de petite fille dont les membres disloqués et l'expression sentimentalement niaise ou équivoque offrent le contraste le plus saisissant et l'aliment le plus vivace à la troublante imagination érotique (éd. allemande en 1934; "Variations sur le montage d'une mineure articulée", Minautore, n°6, Paris, décembre 1934, éd. parisienne, 1936).
A la fin de 1938, Bellmer s'installa à Paris et prit contact avec le groupe surréaliste. Dessinateur, il procède techniquement de la grande tradition germanique, celle de Grünewald et de Baldung Grien, par la plasticité du trait, à la fois musclée et souple, la rigueur des hachures, parallèles ou croisées, l' usage de rehauts de blanc. En esprit, son art est spontanément surréaliste, dans l'expression jaillissante de la "beauté convulsive" réclamée par André Breton; inlassablement, Bellmer inventorie le domaine interdit de l'érotisme, où concourent l'obsession adolescente, le rêve freudien, la rancune virile et le dégoût de la satiété. Parfois influencé par certains procédés surréalistes (jeux perspectifs, associations incongrues), il n'est jamais plus efficace que lorsqu'il concentre sa nostalgie aiguë sur l'élément féminin pur. Ses courbes chantantes et dures, modelant volumes et cavités témoignent en faveur d'une lancinante absence ou d'une évidence chaotique aussi désespérée. Visionnaire et voyeur, ses recherches sur les "transferts anatomiques" (nez-phallus, narines-testicules, visage se formant sous les fesses) témoignent de la richesse associative d'une imagination qui, dit-il "puise exclusivement dans l'expérience corporelle". Outre ses dessins, Bellmer laisse des peintures, des gravures (à partir de 1944), des sculptures. Il a illustré notamment Alcools d'Apollinaire (1948), Justine de Sade (1950), Dialogues de Joë Bousquet (1958). Cet œuvre ne fut longtemps accessible que dans les collections particulières. Bellmer est aujourd'hui présenté dans les grands musées (Paris et New York M.O.M.A)